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Des insectes et du rythme

Une introduction à une forme de communication toute particulière et méconnue chez les insectes ! Voir descriptif détaillé

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Introduction

Les animaux communiquent grâce à différents types de signaux qui sont à la base des échanges entre tout individu. Ces échanges, autant entre deux proches qu’un prédateur et sa proie, sont souvent capitaux pour la survie et la reproduction de chacun. Penchons-nous sur l’une de ces modalités parmi les moins étudiées : la communication vibrationnelle...

Le Projet

Un peu de contexte

Au fil de l’évolution, les animaux ont développé tout un panel de signaux afin de s’échanger des informations. En fonction des espèces, on peut observer des interactions d’ordre sonore (acoustiques), visuelles, tactiles, électriques, chimiques ou encore thermiques 1.

Il existe une autre catégorie bien moins étudiée que ces six autres, celle de la communication vibrationnelle (alias vibratoire ou sismique). Chez les mammifères, on la rencontre par exemple chez les éléphants qui savent produire et comprendre des appels de très basse fréquence pouvant se propager dans le sol sur plusieurs kilomètres2. C’est en effet un moyen d’échange d’informations tout à fait remarquable de par son mode de propagation qui s’effectue à travers le substrat (feuille, branche, sol, etc.), au lieu de l’air libre comme c’est le cas lorsque les signaux sont acoustiques.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette méthode est pourtant très répandue dans le règne animal. Les arthropodes remportent la palme haut la main puisque plus de 90% des insectes employant un système de communication physique utiliseraient la communication vibrationnelle pour échanger avec leur entourage3 ! N’oublions pas que les insectes représentent à eux seuls presque 90% des animaux et plus de la moitié du règne du vivant en terme de nombre d’espèces4...

Halyomorpha halys
Recette pour obtenir un bel insecte : une compartimentation tête/thorax/abdomen, trois paires de pattes, une paire d’yeux composés, une paire d’antennes et des pièces buccales externes. Laisser reposer 400 millions d’années.

Comment que ça marche ?

Notre ouïe, et celle de la majorité des animaux, est basée sur des vibrations transmises via l’air quand il s’agit de signaux sonores aériens. Ces vibrations sont captées et traduites en sons par l’oreille et le cerveau. Pour les insectes se prêtant à l’exercice, la perception des sons est effectuée grâce à un organe tympanique similaire au fonctionnement de notre oreille. Mais dans le cadre de la communication vibrationnelle, ils sont aussi capables de percevoir des sons à travers le substrat sur lequel ils évoluent. Les vibrations sont ainsi directement transférées de la plante (ou toute autre matière solide) à l’individu réceptif grâce à ses pattes, son abdomen ou encore des cils en contact avec le substrat5. Les prédateurs insectivores tels que les oiseaux et les mammifères ne peuvent ainsi pas entendre ce langage secret !

Pour générer ces sons, l’évolution leur a concocté plusieurs outils : frottements entre les pattes ou les élytres, frictions de l’abdomen sur le substrat , coups de boule, vibrations du corps, etc. Les vibrations ainsi formées sont transmises à la plante (ou le sol) qui va se charger de transporter les vibrations, et donc l’information, jusqu’à un destinataire en écoute6.

Ces vibrations peuvent voyager jusqu’à plusieurs mètres (à relativiser par rapport à la taille de l’insecte) mais sont généralement limitées au substrat où elles sont émises. Des chercheurs ont cependant réussi à prouver que la mise en place d’une communication vibrationnelle inter-plantes était possible sur une courte distance : un couple d’une espèce de cicadellidae (une famille d’hémiptères) a réussi à « discuter » alors que le mâle et la femelle n’étaient même pas sur la même plante. Les feuilles sur lesquelles le couple a été placé étaient séparées de plusieurs centimètres… L’air environnant a ainsi transmis les vibrations à la feuille suivante sous forme de son aérien7 !

Cockroach Band Music GIF - CockroachBand Music PlayingBand GIFs

Sur écoute

Et jusqu’alors, personne n’avait pensé à poser un micro directement en contact avec les plantes... Depuis que l’on est capable d’espionner ce petit monde, des belles trouvailles ont vu le jour. On a par exemple découvert que différentes populations appartenant à la même espèce de punaise Nezara viridula présentaient des variations dans leurs échanges en fonction du continent sur lequel on les a trouvées… les insectes étudiés ne présentaient du coup pas le même répertoire de sons, et donc de langage ! Alors que les mâles étaient capables de reconnaître les femelles issues d’un autre continent, ces premiers ont préféré les chants des femelles vivant au sein du même continent d’origine8... comme quoi !

Cela peut sembler relever du détail pour nous, mais cela joue un grand rôle pour ces petits gars. Ne pas être capable de communiquer avec des individus de populations éloignées diminue les chances de reproduction. Des barrières du langage peuvent ainsi se dresser à cause de la distance, pouvant mener à terme à de nouvelles espèces...

Il existe tout un tas d’exemples de communication vibrationnelle chez les insectes, comme par exemple une fratrie de juvéniles de membracides capable de littéralement appeler leur mère quand ils se sentent en danger. D’autres sont capables d’envoyer un signal de recrutement des proches quand une source de nourriture est trouvée9. Ou encore, des scarabées savent imiter le « langage » d’une espèce de fourmis afin de s’infiltrer dans la fourmilière pour carrément profiter du gîte et du couvert10 ! Les connaissances des comportements des insectes s’accumulent petit à petit mais un manque de compréhension flagrant règne encore, tout un monde n’attend qu’à être découvert.

Enfilez vos claquettes

Voici un petit jeu pour illustrer ces propos : saurez-vous deviner à quels insectes appartiennent ces signaux (à ouvrir dans de nouveaux onglets) ?

Les sons
1.
2.
3.
4.
Les bébêtes
1.
Paussus favieri
2.
Chrysoperla agilis
3.
Enchenopa binotata
4.
Pheidole pallidula

La réponse

Eh bien c’était un piège, ils sont dans l’ordre !
Chaque numéro de son correspond ainsi au numéro de l’insecte en question...

Hahaha Evillaugh GIF - Hahaha Evillaugh Snow GIFs

Musique !

Terminons sur une petite surprise pour clore cet article !
Un petit clip, littéralement, concocté par mes soins et qui reprend des signaux de communication vibrationnel... déjà culte chez le peuple de l’herbe !

Références

1 Cocroft R.B., Gogala M., Hill P.S. & Wessel A. (2014) Fostering research progress in a rapidly growing field. In Studying vibrational communication (pp. 3-12). Springer, Berlin, Heidelberg.

2 O’Connell C. (2008) The elephant’s secret sense : The hidden life of the wild herds of Africa. University of Chicago Press.

3 Cocroft R.B. & Rodríguez R.L. (2005) The behavioral ecology of insect vibrational communication. AIBS Bulletin, 55(4), 323-334.

4 Mawdsley N.A. & Stork N.E. (1995) Species extinctions in insects : ecological and biogeographical considerations. Insects in a changing environment. Academic Press, London, 321-369.

5 Gogala M. (2014) Sound or vibration, an old question of insect communication. In Studying Vibrational Communication (pp. 31-46). Springer, Berlin, Heidelberg.

6 Hill P.S. (2014) Stretching the Paradigm or Building a New ? Development of a Cohesive Language for Vibrational Communication. In Studying vibrational communication (pp. 13-30). Springer, Berlin, Heidelberg.

7 Mazzoni V., Eriksson A., Anfora G., Lucchi A. & Virant-Doberlet M. (2014) Active space and the role of amplitude in plant-borne vibrational communication. In Studying vibrational communication (pp. 125-145). Springer, Berlin, Heidelberg.

8 Ryan M.A., Cokl A. & Walter G.H. (1996) Differences in vibratory sound communication between a Slovenian and an Australian population of Nezara viridula (L.)(Heteroptera : Pentatomidae). Behavioural Processes, 36(2), 183-193.

9 Cocroft R. B. (1999) Parent-Offspring Communication in Response to Predators in a Subsocial Treehopper (Hemiptera : Membracidae : Umbonia). Ethology, 105, 553-568.

10 Maurizi E., Fattorini S., Moore W. & Di Giulio A. (2012) Behavior of Paussus favieri (Coleoptera, Carabidae, Paussini) : a myrmecophilous beetle associated with Pheidole pallidula (Hymenoptera, Formicidae). Psyche : A Journal of Entomology.

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